Fandango
C’est si simple.
Mon bébé fait mine de se réveiller de la sieste, son père et moi on se retrouve devant son lit à le regarder, toujours, et à pas en croire nos yeux, toujours pas, sept mois et quatorze jours après. Il se rendort et on a l’air un peu con, les bras ballants. Alors on s’enlace.
J’en ai passé, j’en passe encore, des nuits blanches, des réveils éreintants, « c’est les dents », « la crise des huit mois », « ça va passer », « c’est parce qu’il a perdu son rythme de sommeil ». Rien de tout ça, tout à la fois. Mon bébé koala, mon bébé pègue, mon arapède me tend les bras, s’accroche à ma jambe, s’installe sur mes pieds, se niche dans mon cou.
Jamais je ne me suis sentie aussi puissamment femme. Je connais mon corps, je m’y sens bien, je le contrôle. Je ne m’attendais pas à ce que devenir mère me permette de me sentir si solide de l’intérieur. Ca doit être ça l’épanouissement, le fameux. Ca me dégoûte d’entrer dans de tels clichés mais oui, Ange m’a rendue à moi.
Je monte la pente qui mène à l’auditorium du Palais du Pharo, et je tombe sur la plus belle vue de Marseille, de l’Estaque à Notre-Dame de la Garde (Je t’arrête tout de suite : personne ne l’appelle La Bonne Mère ici). Quelqu’un m’interpelle : « Mademoiselle, vous vous trompez, c’est à droite ». Je sourie, balbutie un merci et me demande comment cette personne sait mieux que moi où je dois aller. Je prends ça pour un signe.
Un pique-nique sur l’herbe verte, sous le ciel bleu, le nez à la brise. Des tommettes partout, l’attaque des hannetons qui fait pleurer ma mère de rire. Et l’été. Mon bébé dans les bras en sortant du musée, il y a tant de vent que la poussette s’envole, et pour une fois, je ris.
Chez le psy, ma mère, moi et vers Ange convergent tous les regards. Il met plein de trucs dégueus à la bouche et je m’en fous. Il tend les bras à sa grand-mère, le soubresaut de mon coeur, le psy sourit. Tout va bien. Elle a eu vingt ans le soir de la musique, le soir de l'été. Le rire du père de mon fils résonne dans mes oreilles. Et je suis si heureuse que j’ai envie de pleurer. Grâce à Dieu, tout va bien.
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